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Le défi de l'Afrique du Sud

par Bernard Tornare 12 Janvier 2024, 13:47

 Image d’illustration : Des Palestiniens marchent au milieu des décombres de bâtiments détruits dans la ville de Gaza, dans le nord de la bande de Gaza, le 24 novembre 2023. Photo AFP

Image d’illustration : Des Palestiniens marchent au milieu des décombres de bâtiments détruits dans la ville de Gaza, dans le nord de la bande de Gaza, le 24 novembre 2023. Photo AFP

 

Il sera très difficile pour le tribunal de l'ONU de ne pas reconnaître les faits et d'exiger qu'Israël arrête immédiatement le massacre.

 

Par Rafael Poch de Feliu

 

"Le droit international n'est ni vraiment international, ni vraiment du droit", mais de l'idéologie : une force idéologique au service de l'hégémonisme et de ses alliés et un formidable instrument de pouvoir, affirme Perry Anderson. Perry Anderson, The Standard of Civilization, NLR 143, septembre-octobre 2023 (newleftreview.org) Fondamentalement, la "justice internationale" est un spectacle.

 

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, aucune guerre américaine n'a mérité l'attention de la Cour internationale de justice, le principal organe judiciaire de l'ONU. Les invasions et les occupations des États-Unis ou de leurs amis ont été bénies ou réduites au silence, tandis que celles de leurs adversaires ont été condamnées, quand elles n'ont pas fait l'objet d'une intervention de guerre. Nous savions déjà tout cela.

 

Nous savons aussi, depuis les Romains, qu'il vaut mieux avoir un monde avec certaines règles, même si elles sont frauduleuses ou non respectées, ou si seulement certains doivent les respecter et pas d'autres, que l'absence totale de règles. Après tout, la loi étant le diktat des puissants, elle vaut mieux que son absence. Il y a parfois des failles dans le mur des puissants, par lesquelles se glissent certaines opportunités de justice.

 

La plainte de l'Afrique du Sud contre Israël pour génocide à Gaza est plus qu'une de ces occasions. Formellement impeccable (https://icj-cij.org/sites/default/files/case-related/192/192-20231228-app-01-00-en.pdf ), c'est un défi ouvert aux États-Unis, la puissance qui a tutoyé et béni le massacre des Palestiniens pendant des décennies. L'équipe sud-africaine, dirigée par John Dugard, ancien défenseur de Nelson Mandela et de Desmond Tutu et rapporteur de l'ONU sur les droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés, dénonce les régimes arabes qui n'ont pas été capables de franchir ce pas.

 

Les preuves de la plainte sud-africaine ne sont pas palestiniennes, mais proviennent de sources au sein même de l'ONU, l'institution pour laquelle travaille la Cour internationale de justice. Non seulement ce massacre a été retransmis en direct dans le monde entier, mais son intention génocidaire est corroborée par une multitude de déclarations de responsables israéliens. Combattre Amalek à Gaza : ce que disent les Israéliens et ce que les médias occidentaux ignorent (substack.com)

 

Il sera très difficile pour le tribunal de ne pas reconnaître les faits et de ne pas exiger certaines injonctions préliminaires obligatoires et immédiatement exécutoires.

 

Dans ce cas, qu'arrivera-t-il à tous les pays, y compris le nôtre, qui fournissent des armes et un soutien politique à Israël ? Qu'arrivera-t-il aux chiens de poche européens complices du blocus de Gaza, en particulier l'Allemagne, la France et les Pays-Bas, qui ont fait l'éloge du "droit d'Israël à se défendre" ? L'Allemagne sera-t-elle du mauvais côté de l'histoire pour la deuxième fois ?", s'est interrogée mercredi la ministre belge de l'aide au développement, Caroline Gennez.

 

Jeudi, ni les principaux journaux allemands, ni les journaux français, ni les journaux américains n'ont mentionné la première session de l'audience à La Haye. France 24 a évoqué les "motivations politiques internes" qui expliqueraient la plainte sud-africaine. Que diront les médias si l'action du Tribunal de La Haye est à moitié décente, par exemple s'il accepte la demande qu'Israël "suspende immédiatement ses opérations militaires à Gaza et contre Gaza", cesse de tuer et de causer de graves dommages physiques ou mentaux aux Palestiniens, de leur infliger des conditions de vie destinées à les détruire en tout ou en partie, et d'imposer des mesures visant à empêcher les naissances palestiniennes, comme l'exigent les Sud-Africains ?

 

Mais que se passera-t-il si c'est le contraire qui se produit, si le tribunal agit conformément à la fonction pour laquelle il a été conçu et refuse de prendre des mesures provisoires, ce qui équivaut à un feu vert pour "d'autres massacres" ? L'infâme épilogue de l'Occident - globalter - est une étape dans la débâcle du prestige de l'Occident et de ses institutions dans le monde, dont nous voyons les symptômes dans une série d'événements vertigineux.

 

Traduction Bernard Tornare

 

Source en espagnol

Le défi de l'Afrique du Sud

Rafael Poch de Feliu est un journaliste et écrivain espagnol, spécialisé dans la politique internationale, la Russie, l'Allemagne et la Chine.

 

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