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Le Niger dans l’axe du mal

par Bernard Tornare 13 Septembre 2023, 14:58

Source : Rebelión

Source : Rebelión

 

Par Guadi Calvo 


L’histoire postcoloniale africaine a été marquée par des coups d’État, la grande majorité d’entre eux visant à approfondir les systèmes de dépendance à l’égard des vieilles métropoles. Les quelques processus qui aspiraient à un changement radical du statu quo établi par les colonialistes ont été violemment avortés : Lumumba, Cabral, Sankara, sont quelques-uns des noms qui ont mené de véritables mouvements indépendantistes et ont été opportunément exécutés par l'Occident comme un avertissement à ceux qui j'ai essayé de les suivre.

 

À cette liste honorable, nous pourrions ajouter le Ghanéen Kwame Nkrumah et le Sud-Africain Nelson Mandela, qui, bien qu’ils n’aient pas été assassinés, ont payé pour le premier l’exil et des décennies de prison pour Mandela pour leur audace. Bien que le colonel Mouammar Kadhafi soit peut-être le plus proche dans le temps, dont la fin tragique a non seulement mis fin à ses rêves panafricains, mais aussi à sa réalité. Son pays, le plus progressiste du continent, a été déchiré pendant plus d’une décennie après son assassinat entre balkanisation et guerre civile dont personne ne pouvait prédire la fin pour devenir, dans le meilleur style somalien, un État en faillite.

 

C’est précisément ce contexte qui nous oblige à attirer l’attention sur la récente série de coups d’État militaires qui ont eu lieu au Mali, au Burkina Faso, en Guinée (Conakry) et au Niger qui peuvent peut-être aspirer à installer une nouvelle vague progressiste sur le continent et à redonner espoir à ses 1,4 milliard d'habitants, soumis au pillage de leurs ressources naturelles, au terrorisme intégriste et au changement climatique. 

 

Concernant le coup d'État au Gabon, le 30 août, il faut préciser qu'il répond à des caractéristiques totalement différentes, c'est pourquoi il est impossible, jusqu'à présent, de l'assimiler à ceux évoqués ci-dessus. On a même appris que le président déchu, Ali Bongo, continuateur d'une lignée de corruption de 56 ans, est déjà libre et va bientôt s'exiler où il sera protégé par ses plus de 1,5 milliard de dollars.

 

Nous savons que l’Afrique est devenue un champ de bataille, à des fins commerciales, entre la Chine et les États-Unis et, dans une moindre mesure, la Russie.

 

Au-delà de ce différend, celui qui continue de maintenir une véritable puissance sur le continent, ce sont les États-Unis qui, là où ils ne le font pas directement, le font via les anciennes puissances coloniales, essentiellement la France et le Royaume-Uni, transformés en appendices de leur volonté.

 

Dans ce cadre, il faudra suivre de près le parcours des quatre nations que l’on a fini par appeler la « ceinture putschiste sahélienne », qui jusqu’à présent ont fonctionné pratiquement à l’unisson, formant en fait un véritable bloc régional.

 

Ce phénomène sans précédent sur le continent contraint directement la France et le reste des puissances occidentales qui, à travers les Nations Unies , ont une présence militaire sur leurs territoires, à commencer à retirer les forces militaires installées depuis une décennie sous prétexte de lutter contre le terrorisme.

 

Les secteurs populaires ont enregistré ces interventions comme une véritable force d'occupation, ce qu'ils sont en réalité, puisque non seulement ils disposent d'un commandement indépendant sans aucun contrôle des gouvernements locaux, mais, au contraire, ce sont ces forces qui ont eu ou ont une ingérence directe. avec les gouvernements africains.

 

C’est fondamentalement là que résident les raisons pour lesquelles les quatre armées qui se sont rebellées depuis 2020 changent complètement l’histoire de leurs pays.

 

Cette situation n’est pas gratuite et pour laquelle ils continuent de payer le prix fort de leur audace en vies humaines. Pour évoquer le cas le plus récent, on citera l'attaque du 5 septembre, où près de 60 hommes des forces de sécurité burkinabè sont morts et des dizaines ont été blessés dans la commune de Koumbri dans la province du Yatenga, au nord du pays. en combat avec des moudjahidines appartenant à certaines katibas de Daesh ou d'Al-Qaida opérant au Burkina Faso depuis 2015.

 

Il est important de noter que depuis septembre 2022, lorsque les jeunes militaires menés par le capitaine Ibrahim Traoré ont pris le pouvoir et pris leurs distances avec la France, obligeant le retrait de toutes les forces de l'opération Sabre, qui, comme Barkhane au Mali, n'avaient rien fait contre les terroristes, le nombre d'actions et d'assassinats des gangs wahhabites a triplé par rapport à l'année et demie précédente, de sorte que les autorités de Ouagadougou soupçonnent que la vigueur renouvelée des takfiristes Ils sont dus à l'aide que certains services de renseignement « étrangers » fournissent aux terroristes, qui dans l'attaque de lundi ont également perdu des dizaines de combattants, faisant de cette bataille la plus importante depuis que le capitaine Traoré gouverne le pays et que, sans aucun doute, il a gagné. ce ne sera pas le dernier.

Une poudrière appelée Niger

 

Même si lors des trois coups d'État précédant celui du Niger, le 26 juillet, chacun des nouveaux gouvernements a mis en œuvre des mesures d'isolement contre le pouvoir que la France maintenait dans chacune de ses anciennes colonies, aucun n'a été aussi radical et urgent que celui des responsables nigériens. du Conseil national pour la sauvegarde de notre patrie (CNSP), qui ont exigé que Paris retire son ambassadeur, Sylvain Itte, ce à quoi s'est déchaîné le président français, Emmanuel Macron, dans une mesure inhabituelle qui ne fait que montrer son manque de volonté de négociation et son désespoir pour l'instant, il refuse d'obéir aux dispositions souveraines du gouvernement du général Abdourahmane Tchiani, leader du CNSP.

 

Macron a déclenché un conflit qui tend encore davantage les relations, non seulement avec le Niger, mais avec toutes les nations alliées, y compris l’Algérie, puissance régionale et pays clé pour toutes les forces armées d’Afrique du Nord.

 

Macron insiste sur le fait que le Niger n'a pas le droit de retirer les lettres de créance diplomatiques d'Itte et, redoublement d'efforts, a nié l'autorité du CNSP pour décider de la présence de son personnel diplomatique et des 1.800 militaires essentiellement destinés à protéger ses exploitations d'uranium, désormais hantées par les nouvelles dispositions de Niamey, qui, entre autres mesures, ont augmenté le prix de ce minéral fondamental pour la France, puisqu'entre soixante et soixante-dix pour cent de l'énergie électrique française provient de centrales nucléaires alimentées en grande partie par l'uranium nigérian.

 

Ce que Macron craignait depuis le début vient de se produire, la junte militaire a ordonné une augmentation de 0,8 euro le kilo à deux cents euros le kilo. Ce qui ne portera sans doute pas atteinte à l'économie française, mais ce sera une insulte intolérable ainsi qu'un terrible exemple pour la métropole, qui bénéficiait jusqu'à présent de cet avantage.

 

Pendant ce temps, des manifestations massives ont lieu pour que, comme cela s'est déjà produit au Mali, au Burkina Faso et en Guinée (Conakry), les forces militaires étrangères quittent le pays.

 

De leur côté, les États-Unis, qui disposent de quelque 1 100 hommes du Commandement africain (AFRICOM) répartis dans trois bases spécialement construites pour les opérations de drones dans le cadre de la stratégie qui entend, ou entendait, utiliser le Niger comme base militaire. épicentre de ses actions pour contenir l’avancée chinoise et russe sur le continent, où le président russe Vladimir Poutine, plus que grâce à l’action russe, à cause de la maladresse de l’Occident, est considéré comme un facteur de libération et de stabilité.

 

Le gouvernement Biden s’est différencié de Macron, par rapport au gouvernement CNSP, en recherchant une voie diplomatique, ce qui reste une surprise. Washington craignait qu'une intervention militaire contre le Niger par les forces de la CEDEAO (Communauté économique de l'Afrique de l'Ouest), encouragée fondamentalement par la France et le Nigeria dès les premières heures du coup d'État, ne soit une lettre d'invitation à la Russie. Washington attend que le CNSP prenne une direction définie.

 

Face à ces nouvelles mesures, l'expulsion de l'ambassadeur, le retrait des troupes et surtout la hausse des prix de l'uranium, le gouvernement nigérien s'est inscrit dans l'axe du mal de plus en plus nombreux.

 

Traduction Bernard Tornare

 

Source en espagnol

 

 Le Niger dans l’axe du mal

Guadi Calvo est un écrivain et journaliste argentin. Analyste international spécialisé sur l'Afrique, le Moyen-Orient et l'Asie centrale.

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