Blog politique de réflexion et d'information de Bernard Tornare orienté en grande partie vers l'Amérique latine, principalement sur le thème de la Révolution bolivarienne au Venezuela. Selon l'actualité, cependant, d'autres sujets peuvent y être abordés. Ce blog n'est pas neutre. Malgré sa partialité et son inclination idéologique, il essaye d'être objectif.

Les médias de la honte

par Bernard Tornare 5 Décembre 2021, 17:13

Par Carolina Vásquez Araya

Les mensonges sont la ressource des tyrans ; les reproduire est un acte de corruption.

Depuis l'invention de la presse à imprimer jusqu'à l'explosion des médias en passant par le réseau mondial, où se croisent toutes sortes d'informations publiques et privées, les communautés humaines ont été conditionnées pour consommer ce que les autres fournissent. De l'humble dépliant à l'ouvrage imprimé le plus sophistiqué, tout matériel de lecture et/ou image comporte un facteur de crédibilité immédiat, avant d'être analysé, confronté à ses sources et considéré comme véridique. Cette qualité intrinsèque du pouvoir de la parole rend d'autant plus dangereux le mauvais usage éthique de ces ressources.

Bien qu'elle connaisse - intuitivement ou de manière démontrable - cette faiblesse des médias, la majorité de la population mondiale consomme voracement leur contenu et agit en fonction de ces propositions. Cela a un impact particulier lors des processus électoraux dans les pays en développement, où la grande majorité de la population ne dispose pas des informations nécessaires pour séparer le bon grain de l'ivraie et tirer ses propres conclusions. Cette faiblesse est généralement due aux politiques des États visant à entraver l'accès à un enseignement public de qualité.

Un peuple éduqué est un danger pour la classe politique et les élites économiques, ce qui se traduit par la consolidation des systèmes d'information visant à manipuler la conscience des citoyens à tous les niveaux possibles. L'administration des ressources publiques - telles que les fréquences de radiodiffusion et de télévision - entre les mains de dirigeants vénaux a transformé ces ressources stratégiques en butin et constitue donc une menace pour la stabilité démocratique des nations faibles. L'influence exercée par les médias de masse, capables d'atteindre tous les coins, est une arme efficace dans la quête du pouvoir politique absolu au sein d'un système d'exploitation et de domination économique corrompu.

Tout au long de l'histoire de notre continent, d'importants médias se sont livrés à cette activité, dont l'influence sur la politique locale a reposé sur le mensonge et la désinformation, en collusion avec des groupes de pouvoir et possédant une énorme capacité à diffuser des concepts, des idées et des propositions visant à préserver un système de gouvernance dépassé et inefficace. Ce sont les médias de l'infamie, dont le travail a toujours consisté à détruire la dynamique même des démocraties par la tromperie.

Face à cet immense pouvoir médiatique, dont le réseau a une portée continentale et qui est administré de loin dans des bureaux inaccessibles par des individus capables de négocier leurs privilèges avec les gouvernements locaux, le citoyen est totalement sans défense. Leur droit à l'information - un droit consacré par des textes constitutionnels et des accords internationaux pompeux - est violé quotidiennement par ces médias ennemis de la déontologie journalistique. Ce pouvoir se traduit par la consolidation de systèmes politiques capables de freiner le développement des pays et de maintenir les peuples sous le joug de la misère, mais plus destructeur encore est son effet sur l'esprit de millions d'êtres humains.

À cette infâme dictature médiatique s'opposent les efforts d'une corporation journalistique indépendante qui se bat à partir de plateformes alternatives - et de certains médias traditionnels éthiques - dans le but d'offrir l'autre côté de la médaille : des informations véridiques, minutieusement étudiées, vérifiées, d'intérêt public et capables de jeter une lumière puissante sur l'opacité des gouvernements. Cette presse indépendante est cependant constamment harcelée et menacée par les centres de pouvoir politique et économique, pour qui le reportage éthique représente une menace pour leurs privilèges. Pour les citoyens, cet effort titanesque de la part de journalistes dignes et cohérents est une ressource précieuse, mais aussi un moyen de retrouver leur espace de participation civique. Soutenir le journalisme authentique et apprendre à distinguer la vérité de l'abondance des mensonges médiatiques est une compétence fondamentale pour notre époque.

Le pouvoir de la parole est aussi une arme à double tranchant.

Traduction Bernard Tornare

Source en espagnol