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Autorité morale - le vide infini de l'Occident

par Bernard Tornare 15 Février 2023, 22:08

Image d’illustration : © Beba73 - Getty Images/iStockphoto

Image d’illustration : © Beba73 - Getty Images/iStockphoto

Par Stephen Sefton

 

La principale fiction sur laquelle s'appuient les élites dirigeantes américaines et européennes pour justifier l'agression de la politique étrangère interventionniste de leurs pays est la prétendue autorité morale de leurs institutions et leurs systèmes de gouvernement. Ceux-ci sont censés être fondés sur la démocratie, les libertés fondamentales (de propriété, de pensée, d'expression) et le respect des droits de l'homme. Ils font disparaître comme par magie les crimes impardonnables et monstrueux qui leur ont permis d'accumuler leurs fabuleuses richesses par la conquête génocidaire et l'imposition de l'esclavage à des dizaines de millions d'êtres humains.

 

Cette supercherie de l'illusion est une composante essentielle de la guerre psychologique constante et sans fin que les élites occidentales mènent contre les populations du monde majoritaire et contre leurs propres populations également. Tout au plus admettent-ils que oui, des événements terribles et des souffrances ont eu lieu, mais tout cela appartient au passé. Aujourd'hui, les idéologues de l'Occident insistent sur le fait que les États-Unis et leurs pays alliés se sont réhabilités à un point tel qu'ils ont le droit de juger qui est bon, qui est mauvais et d'attribuer les récompenses et les punitions appropriées dans chaque cas.

 

Les pays occidentaux ont réussi à maintenir cette illusion idéologique, en grande partie parce qu'ils ont joué un rôle majeur pendant la Seconde Guerre mondiale en vainquant le nazisme en Europe et l'empire japonais en Asie. Même à cet égard, la vérité a été manipulée pour écarter le rôle décisif de l'Union soviétique et de la Chine dans ces victoires. Cependant, les crimes accumulés par les pays occidentaux et leurs alliés depuis 1945, et plus encore depuis la dissolution de l'Union soviétique en 1990, ont atteint un point tel que la fiction de leur autorité morale est impossible à soutenir.

 

Il convient de noter que lorsque nous parlons de l'Occident, nous ne parlons pas seulement des États-Unis et de leurs alliés de l'OTAN, mais aussi de pays comme l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Ces pays aussi, bien que situés dans la partie sud-ouest de l'océan Pacifique, partagent la terrible histoire du colonialisme. Tout comme aux États-Unis et au Canada, en Australie et en Nouvelle-Zélande, les colonisateurs ont mené des politiques génocidaires contre les peuples indigènes. Aujourd'hui, ils servent de gendarmes régionaux pour aider les États-Unis à harceler la Chine. On l'a bien vu lors de la récente controverse au cours de laquelle les États-Unis ont provoqué des émeutes dans les îles Salomon à propos des relations du gouvernement de ces îles avec la République populaire de Chine.

 

Au cours des trente dernières années, les États-Unis et leurs alliés ont adopté de nombreuses méthodes et techniques différentes pour dissimuler la nature criminelle de leurs agressions dans le monde. Lors de leur attaque contre la Serbie en 1999, ils ont faussement accusé le gouvernement serbe d'avoir assassiné des civils au Kosovo comme prétexte pour justifier le meurtre de milliers de civils serbes et la destruction d'infrastructures essentielles. Sur la base de cette expérience, les pays occidentaux ont élaboré la doctrine fallacieuse de la "responsabilité de protéger" afin de justifier leurs agressions et leurs interventions. Souvent, en vertu de cette doctrine, ils ont profité de leur domination sur l'appareil des Nations unies pour organiser des forces d'intervention dans le but de servir leurs objectifs géopolitiques. Fréquemment, ces forces ne remplissent pas correctement leur mission de protection des civils et de maintien de la paix, mais sont maintenues pour promouvoir les intérêts des pays occidentaux et garantir leur accès privilégié aux matières premières.

 

C'est le cas en République démocratique du Congo depuis 1999, où les guerres ont tué plus de 5 millions de personnes et impliqué les forces armées de neuf pays. Dans le cas des agressions rwandaises et ougandaises au Congo, des rapports ont fait état de la manière dont les forces militaires opérant depuis ces pays ont été parrainées par les puissances impérialistes pour assurer leur contrôle des ressources minérales. Tout comme les nouvelles du terrible conflit au Congo ne font presque jamais les gros titres internationaux, un autre terrible conflit, au Yémen, est rarement rapporté. Les alliés des États-Unis et de l'UE, comme l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, ont attaqué le Yémen pour intervenir dans la guerre civile de ce pays. L'ONU a estimé que, depuis 2015, environ 17 millions de personnes au Yémen ont subi les conséquences de la famine dans le pays en raison de l'agression étrangère.

 

L'un des éléments clés de la guerre psychologique menée par l'Occident pour entretenir le faux mythe de sa supériorité morale, du moins parmi les populations de ses propres pays, a été l'application de la répression et de la censure. Les médias et les divertissements, ainsi que les principales sources d'informations plus formelles, telles que les universités ou les organisations non gouvernementales, collaborent généralement pour maintenir un récit qui promeut l'image d'un Occident bienveillant et bon. Cependant, de nombreuses personnes ont été emprisonnées pour avoir fidèlement rapporté les faits d'une manière qui révèle la vérité des crimes occidentaux. Le cas le plus célèbre, parmi beaucoup d'autres, est celui de Julian Assange, qui a révélé des détails irréfutables sur les crimes commis par les États-Unis en Irak et en Afghanistan.

 

Les gouvernements britannique et suédois ont collaboré pour monter de fausses accusations, maintenir Julian Assange en prison et donner aux États-Unis le temps de monter un dossier pseudo-juridique qui pourrait permettre à Assange, qui n'est pas un citoyen américain, d'être extradé vers les États-Unis. L'importance de cette affaire réside dans le fait qu'elle avertit chacun de ce qui peut lui arriver s'il suit l'exemple d'Assange et rapporte la vérité sur les crimes de l'Empire. Cela n'a pas empêché des journalistes courageux de rapporter la vérité sur l'agression des États-Unis et de leurs alliés, de la Syrie au Venezuela en passant par le Donbass. Et cela a conduit les autorités occidentales à censurer les médias russes et iraniens et de nombreux médias indépendants afin de supprimer la vérité, démontrant ainsi leur hypocrisie en matière de liberté d'expression.

 

Et cette répression s'étend également aux populations américaines et européennes en relation directe avec le déclin de la puissance économique et de l'influence internationale de leurs pays respectifs, surtout maintenant dans le cas des pays de l'UE. Depuis 2018, le mouvement des Gilets jaunes en France a mobilisé des centaines de milliers de personnes pour dénoncer l'injustice des politiques économiques du gouvernement. Des milliers de personnes ont été gravement blessées par la répression policière. Plus de sept mille personnes ont été emprisonnées en raison de leur participation aux manifestations, et ce sont de véritables prisonniers politiques. Mais au niveau international, personne ne parle d'eux comme de prisonniers politiques.

 

De la même manière, aux États-Unis, presque personne ne dénonce la situation de plus de mille personnes emprisonnées pour avoir participé aux manifestations de janvier 2021 au Congrès de Washington. Aux États-Unis, en ce moment, alors qu'il n'y a plus un seul terroriste en prison au Nicaragua, aux États-Unis, il y a plus de 1 200 de ceux qui ont agressé le Congrès qui sont qualifiés de terroristes, ils sont accusés et certains d'entre eux ont déjà été condamnés à 20, 30 ans de prison.

 

Et aux États-Unis, il y a des dizaines de personnes que l'on peut à juste titre qualifier de prisonniers politiques. Le camarade Mumia Abu Jamal, un militant d'origine africaine, et le camarade Leonard Peltier, un militant amérindien, ont tous deux passé 40 ans en prison pour des meurtres qu'ils n'ont pas commis. Daniel Hale et Joshua Schulte sont toujours emprisonnés pour avoir fourni des informations sur des crimes commis par l'armée américaine et risquent de longues années de prison.

 

Sont également emprisonnés Alex Saab pour avoir garanti la nourriture du peuple vénézuélien contre le blocus américain et Simon Trinidad pour avoir défendu son peuple contre l'intervention terroriste américaine dans son pays, la Colombie. Parmi les autres cas, citons les héros afro-descendants et indigènes de la lutte contre le racisme aux États-Unis, les victimes musulmanes et arabes de la répression policière injuste, les 36 prisonniers toujours détenus illégalement dans le centre de torture de Guantanamo, ainsi que les militantes féministes et environnementales pareillement injustement accusées et emprisonnées.

 

Il existe de nombreux autres exemples de la manière dont les États-Unis et leurs alliés dissimulent les injustices dans leurs propres pays et les résultats criminels de leur politique étrangère d'agression et d'intervention de ces 20 dernières années. Il existe par ailleurs d'innombrables exemples de la manière dont ils utilisent la censure pour empêcher la dénonciation de leurs crimes. Face à cette réalité, le ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie,  Sergei Lavrov, a déclaré : "Les crimes des colonisateurs n'ont pas de limite de temps et privent à jamais les élites occidentales du droit de prétendre à un quelconque leadership moral. D'autant plus que leurs instincts coloniaux n'ont pas disparu...".

 

Traduction Bernard Tornare

 

Source en espagnol

Autorité morale - le vide infini de l'Occident

Stephen Sefton est un journaliste né en Irlande et vit maintenant à Estelí, au Nicaragua. Il a travaillé en Amérique centrale depuis 1986, principalement au Nicaragua, mais aussi pendant quelques années au Honduras. Il fait du travail communautaire au Nicaragua qui implique des programmes d'éducation, de formation et de santé. Depuis 2008, il coordonne également le site Tortilla con Sal, qui publie des informations sur le Nicaragua.

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